Depuis les Landes jusqu’aux Asturies, dans le nord de l’Espagne, s’étend une belle région naturelle trop souvent négligée par les touristes. C’est bien dommage car si l’on aime les côtes sauvages, un arrière-pays verdoyant, des villages tranquilles et des villes pétillantes de vie, vous y serez comme chez vous.
Nous avons passé plusieurs vacances inoubliables avec nos enfants en France dans les Landes. Le village authentique de Léon nous servait alors de point de chute. Léon vous réserve d’excellents campings de part et d’autre d’un beau lac. C’est le paradis pour les enfants. Dans le bourg se tient tous les matins d’été un grand marché de produits régionaux où l’on peut goûter toutes les spécialités du terroir. Cela va du fromage au saucisson en passant par le miel, le vin et l’apéritif de la région, j’ai nommé le Floc de Gascogne. Quand on est lassé de se promener à pied ou à vélo dans les bois de pins, on se rend sur la plage, située à quelques minutes, pour profiter de l’Océan et de ses vagues énormes.
Un saut en Espagne
C’est lors d’un séjour là-bas en famille qu’a probablement surgi l’idée un peu folle d’entamer un voyage de Léon à Léon, cette fois en Espagne. Ce projet est resté en attente jusqu’à l’an dernier. Et c’est à deux, sans les enfants et sans la caravane que nous sommes partis dans un motorhome compact. En automne, le lac très calme semble être là juste pour nous et nous choisissons notre emplacement de motorhome baigné de lumière comme il nous plaît.
Par les petites routes nous nous acheminons vers Biarritz, très belle et un peu mondaine. Sa magnifique plage en fait une étape de choix. Et nous nous arrêtons également à Saint-Jean-de-Luz. Malgré la pluie nous partons en balade sur le chemin côtier en direction de la ville. Et soudain nous voici confrontés avec un phénomène qui nous marquera tout au long du voyage: nous sommes sur le ‘Camino’! Tous les jours nous allons rencontrer de vaillants marcheurs qui se dirigent vers Saint-Jacques de Compostelle. En route vers Saint-Jean-de-Luz nous croisons une dame quinquagénaire un peu agitée vêtue d’une veste jaune vif, munie d’un tout petit sac à dos, serrant un iPhone dans la main, qui nous demande d’une voix tremblante, tantôt en français, tantôt en anglais, la direction de Saint-Jean. Malgré ses outils modernes, elle s’est engagée dans la mauvaise direction. Elle nous confie être Canadienne, mère de cinq enfants, et être à la recherche d’elle-même. Nous l’avons un peu prise sous notre aile et ne l’avons plus jamais revue…
Saint-Jean-de-Luz nous apparaît très attrayante. Pas de circulation automobile dans les rues, un joli port et surtout une belle ligne côtière: tout ce qu’il faut pour nous charmer. Nous ne nous lassons pas de regarder les planchistes qui bravent les plus hautes vagues.
Super San Sebastián
Au-delà de la frontière, près d’Irún, le soleil apparaît à nouveau et à San Sébastián, haut-lieu de la gastronomie dans le Pays Basque espagnol, on se croirait en été. Nous nous installons dans le beau camping Igueldo, près de la ville. Il paraît qu’on y mange bien, mais mieux vaut faire ces premières expériences en ville. Pour cela nous prenons le bus 16 qui nous amène au bout de 25 arrêts au coeur de la ville. Tout est magnifique, où que l’on pose le regard. Sur la plage en arc de cercle on aimerait tout photographier. A gauche, voilà le rocher Igueldo, dont on atteint le sommet avec le ‘Funikular’ qui date d’une centaine d’années. Le panorama est superbe. Au-delà de la petite île, on découvre la presqu’île, le château et la statue du Sacré coeur. On ne se lasse pas de flâner dans la ville. Les rues sont libres de toute circulation automobile pour la plupart et on y trouve partout des pinxobars, l’équivalent basque des bars à tapas espagnols.
L’horreur de Guernica
J’introduis le nom de Bermeo dans mon gps dans l’espoir qu’il va m’indiquer une belle route le long de la côte. Sans m’en rendre compte, nous nous dirigeons vers l’intérieur des terres, en direction de Vitoria-Gasteiz. Les routes sont impeccables et semblent très récentes. Nous faisons halte à Guernica, théâtre d’un affreux bombardement en 1937. On ne peut passer sans s’arrêter dans une ville aussi chargée d’histoire. Pour les Basques, c’est un lieu sacré qui revêt une signification symbolique très forte. C’est dans cette capitale spirituelle du Pays Basque que se tenaient les assemblées législatives. Ce n’est donc pas un hasard si elle fut choisie en 1937, en pleine guerre civile, par le dictateur Franco pour être bombardée par l’aviation nazie lors d’un pilonnage sans précédent au titre de soutien au dictateur. Le peintre Pablo Picasso exprima sa colère au sujet de ce massacre en réalisant l’énorme et majestueuse toile intitulée Guernica, un cri de refus de toutes les guerres. Une copie en céramique est exposée dans un petit parc de la ville. Nous visitons la ‘Casa de Juntas’, le parlement local, et découvrons dans le jardin le ‘Guernikako Arbola’, l’arbre de Guernica, symbole des racines anciennes du peuple basque. On en retrouve une représentation à l’intérieur dans le superbe plafond en vitrail. Dans la petite ville paisible, ne manquez pas de montrer à vos enfants le musée qui retrace tout le drame de Guernica.
Nous faisons halte à Guernica, théâtre d’un affreux bombardement en 1937. On ne peut passer sans s’arrêter dans un lieu aussi chargé d’histoire.
Matxitxako
Un peu plus loin, la petite localité côtière de Bermeo est un endroit où le tourisme n’a pas encore été inventé. Lors d’une promenade dans la ville agréable avec ses jolis ports de pêche et de plaisance on apprécie pleinement la tranquillité et l’authenticité. Pour atteindre le cap en dehors de la petite ville, vous pouvez pédaler sur un trajet de 5 kilomètres avant de vous élancer en hors piste vers le phare de Matxitxako. Ce bel endroit loin de tout est idéal pour observer les baleines en hiver. En automne vous y verrez parfois des dauphins, à l’époque où ils changent de territoire. Plus loin encore, voici San Juan Gaztelugatxeko, beaucoup plus peuplé et vraiment spectaculaire. Deux chemins s’élancent vers la célèbre chapelle du 12e siècle située sur un rocher. Il est difficile de choisir. En cours de route nous allons de surprise en surprise et la vue devient de plus en plus belle à mesure que nous grimpons. Le chemin passe par un petit pont à trois arches et un escalier de 241 marches. On dirait une version en réduction de la Grande Muraille de Chine. Les panoramas sont impressionnants. Inutile de vous dire que vous arrivez à la chapelle, 75 mètres plus haut, complètement essoufflé.
Le Guggenheim de Bilbao
L’aire de stationnement à Bilbao coûte les yeux de la tête mais sa situation est magnifique. On y dispose d’un panorama superbe sur toute la ville. Depuis la hauteur on voit comment la rivière se fraie un passage dans la ville. A l’avant-plan on découvre le stade et au loin, si on a de bons yeux, on voit les contours et la couleur du musée Guggenheim. Le bus 58 vous amène pour 1,25€ dans l’agréable centre urbain. C’est une ville moderne dont le coeur historique est bien conservé. Prévoyez une journée entière pour la visite et vous aurez d’agréables surprises. Comptez certainement une deuxième journée pour le Guggenheim au bord de la rivière, à côté du pont rouge. Nous traversons le haut Puente la Salvo, d’où l’on a une belle vue sur les panneaux en titane du musée. Ne vous précipitez pas car cet édifice unique imaginé par l’architecte canadien Frank O. Gehry mérite toute votre attention, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Cette ‘fleur de titane’ est devenue le symbole de Bilbao. Côté rue c’est le ‘Puppy’ couvert de fleurs de Jeff Koons qui vous accueille. Je ne parviens pas à déterminer si cette mascotte de Bilbao vous considère avec sympathie ou si elle a l’air pitoyable. Du côté de l’eau vous attendent d’autres sculptures remarquables. Nous reconnaissons aussitôt ‘Maman’, la grande araignée de Louise Bourgeois. Cette oeuvre à forte charge symbolique a été longtemps visible à côté de l’église Notre-Dame des dunes à Mariakerke. La ‘Fire Fountain’ d’Yves Klein est placée tout à côté et les ‘Tulips,’ également de Jeff Koons, sont visibles de très près à l’intérieur du musée. La brume soudaine sur l’eau n’a rien à voir avec la météo: c’est la ‘Fog Sculpture’ de Fujiko Nakaya. A l’intérieur, outre la superbe architecture du bâtiment, vous verrez essentiellement de la peinture contemporaine datant de la période après 1950. Je vous recommande la lecture du roman de l’Américain Dan Brown, ‘Origine’, pour une excellente description de ce musée.
Retour dans le temps
En passant par Santander, une ville très étendue, nous nous dirigeons vers Santillana del Mar. Avant d’y arriver, nous déposons le motorhome sur une aire de stationnement improvisé. Le moyen âge semble revivre dans cette ville conviviale très fréquentée, ce dont les commerçants ont bien conscience. Le parfum du commerce qui flotte entre les édifices historiques est un peu trop fort à notre goût.
Trois kilomètres plus loin, à Altamira, nous nous plongeons dans un passé encore plus lointain. Nous avons de la chance car l’accès à la réplique de la grotte préhistorique et au musée est gratuit le dimanche. Comme à Lascaux, les autorités souhaitent protéger la grotte authentique d’Altamira. Nous admirons les superbes fresques au plafond: bisons, chevaux, chèvres, mains humaines, le tout datant de 13.000 à 36.000 ans et on prend conscience qu’on est en présence des plus anciennes formes d’art. Le berceau de notre civilisation en quelque sorte.
Nous avons de la chance car l’accès à la réplique de la grotte préhistorique et au musée est gratuit le dimanche.
Capricho de Gaudí
Nous longeons la côte jusqu’à la belle localité de Comillas. Nous déposons le motorhome près du port avec vue sur mer. Les horodateurs ne doivent être alimentés que jusqu’au 15 septembre, quelle chance pour nous! Nous flânons dans Comillas, mais nous sommes spécialement venus pour Gaudí. A l’aube de sa carrière, le fameux architecte, âgé d’à peine 30 ans, a dessiné un délicieux petit palais plein de couleurs et de symbolisme pour un avocat du cru. A l’heure actuelle cette demeure féerique flanquée d’une tour et d’un jardin parle toujours à l’imagination. Elle compte trois niveaux, se développe autour d’une véranda ensoleillée et présente des détails originaux et modernistes tels qu’on les retrouvera plus tard dans la fameuse basilique Sagrada Familia de Barcelone.
Picos de Europa
En passant par l’authentique San Vicente de la Barquera, nous pénétrons dans l’arrière-pays où nous attendent les Picos de Europa, appelés ainsi parce que c’étaient les premiers repères montagneux que les explorateurs découvraient en rentrant de leurs aventures sur les mers. Par une route de plus en plus étroite qui suit la Desfiladero de la Hermida, la plus longue gorge d’Espagne, nous arrivons à travers les montagnes à Potes, où nous filons vers l’ouest jusqu’à Fuente Dé. La route s’arrête là. La vue sur les montagnes sauvages est grandiose. Nous prenons le téléphérique de 50 ans d’âge qui nous mène dans un voyage spectaculaire à une hauteur de 2614 mètres, soit 900 mètres de plus que notre point de départ. Il fait plutôt frais là-haut et brumeux mais quand les nuages disparaissent, nous profitons d’un panorama vertigineux, tant vers la vallée que vers les rochers qui forment un arc de cercle. L’ensemble nous fait songer aux Dolomites dont les cimes seraient moins aigües. Nous prenons le chemin 24 qui nous ramène en quatre heures et demie à notre point de départ. La randonnée est magnifique, variée et truffée de panoramas grandioses.
Vers les Asturies
Pour continuer par les Picos, il nous faut retourner vers Potes. Puis la route nous mène par un large arc de cercle autour du ‘Parque Nacional de los Picos de Europa’ jusqu’à la mer à Ribadesella. La route est étroite et sinueuse et toujours spectaculaire. Nous traversons de beaux villages et les paysages changent tout le temps. La beauté des lieux s’intensifie encore à Puerto de San Glorio et après Portilla de la Reina jusqu’à Riaño notre voyage prend un tour inattendu. On dirait que l’énorme lac est asséché pour plus de la moitié. Notre trajet se termine par une route spectaculaire de 50 km striée de profondes ornières où les portions en ligne droite n’atteignent jamais 100 mètres. A Cangas de Onís nous bifurquons vers le lieu de pèlerinage de Cavadonga où nous sommes surpris par la densité de la foule.
La fin du voyage de Léon à Léon
La route vers Léon passe par les montagnes avec beaucoup de virages et de montées et des panoramas sublimes en contrepartie. Notre charmante escapade dans le nord de l’Espagne se termine dans la capitale gastronomique du pays. A l’orée de la ville, tout près de la rivière, nous réussissons à occuper le dernier emplacement pour motorhome. De là, on est à 10 minutes du coeur de la ville. Nous visitons la basilique romane de Saint-Isidore, la Casa de Botines, une création de Gaudí dont nous sommes des fans, et terminons par la superbe cathédrale. Elle se montre dans tout son éclat au soleil de septembre et est envahie de pèlerins du Camino qui considèrent Léon comme une étape importante de leur pèlerinage vers Saint-Jacques. Difficile d’imaginer un plus beau point d’orgue que Léon. Et pourtant… nous rêvons déjà de la tout aussi belle Burgos, que nous ne manquerons pas de visiter au retour.
Infos
www.spain.info/be
www.basquecountrytourism.eus
www.turismodecantabria.com
www.turismocastillayleon.com
www.asturiestourisme.fr
Campings
www.vayacamping.net
www.eurocampings.net
www.eurocampingcar.com
- Aire de stationnement à Léon, France : vastes emplacements au bord du lac
- Aire de stationnement Milady à Biarritz : près de la plage
- Camping Igueldo, San Sebastián : près de la ville
- Aire de stationnement Bakio, gratuit : près de la ville et de la plage
- Aire de stationnement “Autocaravaning Kobetamendi” Monte Kobeta 31 Bilbao
- Aire de stationnement El Helguero à Ruiloba : à quelques km de Comillas
- Camping La Isla Picos de Europa : à 3 km de Potes
- Camping Ribadesella, Sebreño, Ribadesella : au-dessus de la ville
- Aire de stationnement à León : Avenida de España 5